Les Nationales en bout de route.

Publié le par Michel Le Fouineur

Les routes nationales se font de plus en plus rares. La plupart, rapatriées dans le giron départemental, ont déjà changé de nom.
Une page de la vie automobile française se tourne. Les Nationales arrivent en bout de route. Au début de l'année, elles ont été massivement transférées aux départements qui ont récupéré 18.000 km de bitume dans un mouvement bouclé en janvier 2008. Ils étaient déjà responsables de 360.000 km de routes départementales. Désormais, le réseau national ne comporte plus qu'une vingtaine de milliers de kilomètres : 11.800 km de routes nationales et d'autoroutes non concédées plus 8.000 km d'autoroutes concédées.
S'agit-il de la fin d'une époque ? Celle où, de la joie dans le gosier, Charles Trenet chantait, au milieu des années 50, une Nationale 7 devenue symbole des congés payés ? Eric de Balincourt, directeur de la DIR (Direction interdépartementale des routes) qui regroupe la Lorraine, le Franche-Comté, l'Alsace et une partie de la Champagne-Ardenne (douze départements au total), témoigne :
- Je connais bien le sujet puisque j'ai été directeur de la DDE (Direction Départementale de l'Equipement) de l'Allier. Il y a parfois eu des confusions. Mais une route comme la Nationale 7 reste globalement dans le giron national. Le critère de choix est simple. Si une route n'a qu'une fonction locale, elle ne dépendra plus de l'Etat. Ce n'est pas le cas de la Nationale 7.
Pourtant doublée depuis longtemps par une autoroute qui a largement absorbé son trafic.
L'Est, qui constitue la plus grande DIR de France (1.650 km, l'équivalent d'une société autoroutière), se trouve sous le coup d'un découpage identique. Les autoroutes et les grands axes relèvent toujours de l'autorité nationale. Parmi eux, des voies comme l'A31 (100.000 véhicules par jour au niveau de Metz ou Nancy), la RN 57 (50.000 unités à Epinal) voire la mythique N4 qui relie Strasbourg à Paris (une moyenne quotidienne de 20.000 à 30.000 véhicules avec beaucoup de camions).En gros, le réseau national du quart nord-est est désormais irrigué par un axe vertical (A31), deux axes horizontaux (RN4 et RN19) ainsi que leurs plus grosses ramifications.
- Le 23 octobre 2006, la DIR était opérationnelle à 80 %, souligne Eric de Balincourt ; pour des raisons climatiques, le Doubs et le Jura ont basculé le 1er avril 2007.
Le mouvement s'est effectué sans heurt. A une exception près... Celle de la RNVS, plus connue sous le nom de Voie sacrée, qui a provoqué une véritable guerre de tranchées entre Christian Namy, le président du Conseil général de la Meuse, et Arsène Lux, le maire de Verdun. Au premier qui avait accepté la départementalisation, le second rétorqua qu'on ne pouvait "transformer la Voie sacrée en une quatre voies anonyme, impersonnelle et sans âme". En 1916, lors de la bataille de Verdun, l'historique route alimentait la boucherie du front : entre 15 à 20.000 hommes et deux milles tonnes de matériel y transitait tous les jours. Au total, 8.000 véhicules s'élançaient quotidiennement entre Bar-le-Duc et Verdun. Un toutes les quatorze secondes.
Arsène Lux lança une pétition nationale qui réunit 130 signatures de parlementaires opposés à la "banalisation de la Voie sacrée". Sans changer quoi que ce soit sur le fond. La paix des braves se signa sur un compromis. La RNVS rejoint le giron départemental mais conserve ses bornes rouge et blanc surmontées d'un casque de Poilu. L'Etat les entretiendra. Mieux, le département y a ajouté des silhouettes de combattants de la guerre de 14-18. Artère du Souvenir et de l'avenir, la Voie sacrée mène aujourd'hui à Issoncourt : lieu d'implantation de la gare Meuse du TGV Est.
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(source : Philippe Marcacci ; est magazine du dimanche 15 juillet 2007)

Publié dans société

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