Sacha Guitry - L'homme de la rentrée théâtrale.
Voici cinquante ans s'éteignait Sacha Guitry. Ce virtuose des mots et du trait d'esprit a marqué la première moitié du XXe siècle. Plusieurs de ses pièces sont à l'affiche cet automne 2007.
- Jouer du Guitry, il n'y a rien de plus jubilatoire !
Installé dans la salle du théâtre Pépinière-Opéra, à Paris le comédien et fameux professeur d'art dramatique Jean-Laurent Cochet est intarissable sur son "maître", dont on commémore, cette année (2007) le cinquantième anniversaire de la disparition. Il ne l'a pourtant jamais rencontré. Mais la cinquième et dernière épouse de Sacha Guitry, Lana Marconi, lui a fait le plus beau des compliments, après l'avoir vu jouer une pièce de son mari :
- Je suis bouleversée. Vous êtes le seul qui ne cherchez pas à l'imiter, mais qui me l'évoquez.
Sacha, fils de Lucien Guitry, très grand acteur de théâtre, naît en 1885 à Saint-Pétersbourg, lors d'une tournée théâtrele de ses parents en Russie. Le tsar Alexandre III devient son parrain et, dès son enfance, il côtoie le Tout-Paris de la Belle Epoque : Sarah Bernhardt, Auguste Rodin, Claude Monet, Georges Feydeau... Les écrivains Jules Renard, Tristant Bernard, Edmond Rostand, Colette, mais aussi Léon Blum, fréquentent le cercle familial. A leur contact, il se forge une personnalité éprise d'art et de beauté.
- Son écriture est unique, il y a du Marivaux en lui, du Beaumarchais..., estime Jean-Laurent Cochet. Dramaturge, écrivain, metteur en scène, cinéaste... la palette de Guitry est d'une richesse exceptionnelle.
Il n'a pas 17 ans lorsqu'il signe sa première pièce, une opérette. Suivront plus de cent vingt textes, qu'il joue des milliers de fois, accumulant les succès. Le dramaturge prend l'habitude de filmer ses pièces et de se lancer dans des fresques historiques. Son style s'impose : finesse, goût du paradoxe, dialogues étincelants. Il magnifie la langue à travers un rythme, un phrasé qui n'appartiennent qu'à lui. Il met en scène les relations homme-femme avec une misogynie évidente, mais dont la dimension comique est irrésistible. Sous couvert de légèreté, la gravité des choses de la vie affleure pourtant.
Au sommet de sa gloire, quand la Seconde Guerre mondiale éclate, il continuera à travailler sous l'Occupation sans abandonner sa vie mondaine. Ce qu'on lui reprochera à la Libération. Emprisonné puis innocenté, il restera marqué par cet épisode, aujourd'hui sujet à controverses.
- On lui a fait un procès d'intention immonde, affirme Jean-Laurent Cochet. On ne lui pardonnait pas sa célèbrité.
Après guerre, Guitry tournera cependant avec les plus grands : Michel Simon, Fernandel... Et lancera les comédiens Jean Poiret, Michel Serrault, Darry Cowl.
A sa mort, le 24 juillet 1957, à l'âge de 72 ans, il laisse 36 films, 124 pièces de théâtre, 32 ouvrages divres, des centaines de caricature, des dizaines de tableaux et même trois bustes de Jules Renard ! Son oeuvre, aujourd'hui, n'a rien perdu de son piquant. Le couple, l'amour, le goût du pouvoir, l'éducation, la transmission sont des thèmes éternels.
- Cet homme léger mais profond était ce qu'il a raconté dans ses pièces, conclut J.-L. Cochet. En d'autres termes, comme Guitry aimait à répéter :
- Ce qui ne tolère pas la plaisanterie supporte mal la réflexion.
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(source : Sabine Harreau ; Pélerin n° 6514 du jeudi 4 octobre 2007)
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