Pharmacien, magicien et champion du monde.
Un apothicaire vosgien révolutionne l'art de l'illusion. Son numéro de corde inédit est repris aujourd'hui par les plus grands prestidigitateurs, de Hong-Kong à San-Francisco.
¤¤¤¤¤
Francis Tabary est un garçon discret, un solitaire qui sort rarement du bois, ou plutôt qui ne quitte à pas de loup son village vosgien de Saint-Michel-sur-Meurthe que pour des destinations mirifiques : l'Océan Indien, le Pacifique, Las Vegas, où son nom est plus connu qu'à Saint-Dié, à 4 km de chez lui. Dans la capitale du jeu et du spectacle, deux prestidigitateurs présentent toujours le tour de corde original qui lui a valu d'être sacré champion du monde de "close-up" (magie rapprochée) en 1991 à Lausanne. Tour connu dans le monde entier et sur Internet sous le qualificatif de "la routine de Tabary".
Mais commençons par le début : Francis, enfant de Fraize dans les Vosges, fils d'un décorateur de théatre devenu peintre en bâtiment et d'une professeur de mathématiques, n'a que 7 ans quand il voit le magicien ambulant Gustavio dans son village. Le garçonnet est fasciné : Gustavio endort son monde, conduit une voiture les yeux bandés et surtout - ce qui effraye le petit Vosgien - sort du vin et des pièces de monnaie du nez des gens et fait tenir sa partenaire hyptnotisée sur trois sabres... puis en enlève deux !
Têtu, Francis traque les explications magiques dans les journaux, trouve celle d'un tour de cartes dans "Femmes d'aujourd'hui" et se fabrique son premier jeu bisauté. Il échange des trucs avec ses copains de lycée à Gérardmer et plus tard, à 16 ans, découvre et s'achète les livres de prestidigitation Payot au BHV de Paris.
L'habileté vient en manipulant et l'acordéon qu'il pratique pendant 10 ans renforce sa dextérité. Il acquier chez Mayette, célèbre magasin de magie de la capitale, des boules rouges qu'il fait apparaître et disparaître entre ses doigts. Se fait parrainer dans l'art de l'illusion par un ingénieur en retraite de Senones, M. Vigezzi, qui posséde plus de 1.000 livres de magie et qui l'introduit dans le cercle de magie de Nancy. Plus tard, étudiant en pharmacie, il créera avec d'autres illusionnistes celui de Strasbourg, et gagnera son argent de poche en présentant des tours dans les bars d'étudiants. Parallélement, il raffine son art sous la férule d'un extraordinaire magicien de Metz, Jean Guilleux :
- Il me présentait un tour de pièces ou de cordes, ne l'expliquait pas et me disait de lui donner ma solution le mois suivant. Je cogitais, je devenais fou, mais j'ai beaucoup appris.
Lors d'un festival de magie à Strasbourg, en 1969, le speaker présente un tour avec trois cordes que Francis Tabary regarde du poulailler. Il parvient à le reconstituer en une nuit. Par la suite, il fera de même avec le numéro de cordes du magicien Jacques Delors (rien à voir avec la politique), sans le voir mais juste en entendant un enregistrement audio de "La piste aux étoiles".
C'est pour créer à son tour un numéro de cordes inédit qu'il va cogiter pendant dix ans dans le bureau de son officine de Saint-Michel. En juillet 1991, il est fin prêt et présente devant un jury de prestidigitateurs "bluffés" un numéro de dix minutes, sur un commentaire à la Devos, avec une seule corde de trois mètres qu'il coupe, noue, fusionne et qui a toujours trois mètres à la fin. Magique !
¤¤¤¤¤
(source : Gérard Charut ; est magazine du dimanche 29 avril 2007)